Laissez-nous vous peindre une scène : vous avez cuisiné pendant deux jours, passé la journée à nettoyer la maison, les invités viennent de finir l'apéro, c'est le moment de passer à table. On ouvre le vin, on sert, et là, c'est le drame : le vin n'est pas à la hauteur de vos efforts titanesques! Que s'est-il passé ? Vous connaissez pourtant la cuvée ! Un doute vous ronge : aurait-il fallu le carafer ??
Carafer le vin est une pratique courante chez les amateurs de vin, mais beaucoup de gens se demandent quand il est approprié de le faire. Quel que soit le format de carafe que vous avez à la maison (une carafe en verre, une grosse théière reconvertie, un erlenmeyer comme ceux que nous utilisons nous-même à la cave), son but final est toujours le même aérer le vin et permettre aux arômes et aux saveurs de se développer pleinement. Et non, ce n'est pas de la magie, c'est simplement l'apport d'oxygène qui, en se mélangeant au vin, va accélérer des réaction chimiques normalement très lentes, afin de libérer plus d'arômes, d'assouplir les tanins, d'adoucir la morsure de l'alcool.
Plusieurs cas se présentent : les vins jeunes pour commencer, ceux qui ont été mis en bouteille récemment. Ils peuvent bénéficier d'une carafe, ou au moins d'une aération au préalable. Nous le conseillons surtout sur certains vins parfois rustiques : les négrettes de Fronton, les malbecs de Cahors, les cabernets francs de Loire. Souvent, c'est une affaire de cépage donc, mais le taux d'alcool peut jouer aussi. S'ils sont très ensoleillés, les vins peuvent mettre du temps à révéler leur fruité, et une aération même brève (15-30min) est amplement suffisante pour les réveiller. Même pas besoin de carafer, vous pouvez simplement les laisser ouverts, et prélever un petit fond de verre pour que l'air ait plus de surface pour atteindre le vin !
Les vins tanniques maintenant : les cuvées qui ont tendance à être plus corsées et plus astringentes en bouche auront souvent d'un petit carafage. Et ceci, qu'ils soient jeunes ou vieux (dans une certaine mesure, voir plus bas). Les tanins sont plus agréables et plus harmonieusement intégrés au vin s'ils ont un peu respiré au préalable, avec une sensation moins anguleuse en bouche. Souvent, les vins tanniques sont aussi alcooleux, mais ce n'est pas toujours le cas nous travaillons par exemple de beaux vins de Gaillac à la cave, aux cépages puissants, mais à moins de 12% d'alcool! Et il faut quand même les ouvrir, à la fois pour leur tanins acerbes, mais aussi pour la rusticité des deux cépages de la cuvée en question.
Finalement, on arrive aux vins vieux, qui ont passé en bouteille de nombreuses années. Les vins vieux ont tendance à développer des sédiments et des dépôts dans la bouteille, ce qui peut affecter leur goût et leur texture. Une carafe peut aider à séparer les sédiments et à laisser les arômes et les saveurs se développer pleinement. Attention cependant, si le vin est TRES vieux (plus d'une vingtaine d'année), un carafage peut être détrimentaire. L'apport brusque d'oxygène peut faire d'un coup réagir tous les arômes restants, et faire s'effondrer totalement la structure aromatique. D'une manière générale, mieux vaut goûter le vin avant de carafer, afin de voir si le plaisir est déjà au rendez-vous !
Mention honorable aussi pour le carafage des vins blancs, et des vins nature. Les premiers peuvent être austères à la première gorgée, du fait du stockage au froid, de leur jeunesse, ou d'autres facteurs. Une ouverture peut changer le profil de la dégustation avec un peu de patience ! Et les vins natures, s'ils sont souvent des vins glouglou et bus dans leur jeunesse, ont parfois un peu réduction à l'ouverture, du fait de l'absence de sulfites. Un petit passage à l'air redressera rapidement la barre, et pourra aussi faire disparaître le côté perlant qui peut survenir dans certaines cuvées !
Le mieux est toujours d'en parler à votre caviste, et nous serons ravis de vous aiguiller sur la meilleure manière d'apprécier les vins que nous avons amoureusement sélectionnées pour la Cave de César !